Le notaire a renvoyé tout le monde à la case départ
Faute d’une notification régulière de la vente de la part du notaire,la Safer n’a pas pu se substituer aux acquéreurs.
Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.
L’HISTOIRE. L’annulation d’une vente, à la demande de la Safer, constitue parfois un « coup d’épée dans l’eau », avec pour seule conséquence la remise des parties dans l’état antérieur à l’aliénation. La Safer du Grand-Est l’a appris à ses dépens. Deux indivisaires avaient proposé à Axel, pour lui permettre de s’agrandir, de lui vendre l’usufruit de leurs parcelles. La nue-propriété étant cédée à un GFA qu’il avait constitué avec son frère.
Le notaire avait déclaré le projet d’aliénation à la Safer. Un mois plus tard, l’acte de vente avait été signé au bénéfice d’Axel et du GFA. La société d’aménagement foncier a ensuite fait savoir au notaire qu’elle exerçait son droit de préemption. Elle avait assigné les parties en annulation de la vente et en substitution aux acquéreurs.
LE CONTENTIEUX. La Safer était persuadée de son bon droit. Son avocat avait invoqué une récente jurisprudence qui avait admis - à l’occasion de la vente simultanée de la nue-propriété et de l’usufruit à une personne physique et à une personne morale - que l’opération n’avait pas constitué une cession isolée de nue-propriété ou d’usufruit. Elle avait porté sur ces deux droits, cédés simultanément sur le même immeuble par son unique propriétaire ayant une communauté d’intérêt. Le but de l’opération était d’échapper au droit de préemption de la Safer.
Or, en l’espèce, il n’était pas sérieusement contestable qu’il existait une communauté d’intérêt entre Axel et le GFA constitué avec son frère et dont il était le gérant. En réalité, l’objet de la vente était bien la cession de la pleine propriété des parcelles à deux personnes ayant le même intérêt. L’annulation de la vente devait être prononcée avec substitution aux acquéreurs, conformément à l’article L. 412-10 du code rural applicable au droit de préemption de la Safer. Axel avait démontré que, sous l’empire du droit en vigueur antérieur à la loi d’avenir de 2014, l’opération était régulière et exempte de toute fraude. Mais les juges avaient prononcé l’annulation de la vente et ils avaient ordonné la substitution aux acquéreurs. La cession avait bien, selon eux, pour objet le transfert en une seule opération de la pleine propriété des parcelles.
Mais s’agissant de la faculté pour la Safer de se substituer aux acquéreurs, l’avocat d’Axel avait sorti la grosse artillerie. Il est de principe que lorsque le projet de vente d’un bien rural n’a fait l’objet d’aucune notification valant offre de vente à la Safer, celle-ci n’est pas fondée à demander sa substitution. La Cour de cassation l’a suivi et a censuré la cour d’appel. En effet, le notaire avait envoyé une déclaration d’opération exemptée du droit de préemption, conformément à l’article R. 143-9 du code rural, et non pas une notification valant offre de vente. La substitution aux acquéreurs n’était pas possible.
L’ÉPILOGUE. La cour de renvoi ne pourra que remettre les parties dans l’état initial antérieur à la vente. Et si les vendeurs ont toujours l’intention de céder leurs parcelles, ils devront, cette fois, notifier régulièrement leur projet à la Safer afin de lui permettre d’exercer son droit de préemption. Le GFA pourra, quant à lui, se porter candidat à la rétrocession, tout en accompagnant son dossier d’une promesse de bail à long terme au profit d’Axel.
Pour accéder à l'ensembles nos offres :